Le REX ou retour d’expérience constitue une étape importante qui initie une démarche réflexive sur notre dispositif : il s’agit d’une démarche de prévention des risques et d’amélioration, en isolant les points forts, les pistes d’améliorations, les difficultés du projet dans sa globalité (conceptualisation, méthodes de projet…) pour analyser les causes et conséquences et en tirer des enseignements.
Il est évident que les délais et les conditions de réalisations du projet (non-accès au musée en raison des décisions gouvernementales en contexte d’épidémie de la COVID-19, pas de réel test utilisateur…) ne nous permettent pas d’envisager tous les aspects positifs et négatifs du projet ; nous tâchons cependant de formuler un maximum d’éléments vis-à-vis de ce qui nous est accessible pour une auto-analyse.
L’adéquation du livrable avec le besoin formulé
Historique du projet comprenant les points forts et les écueils
- Difficultés à définir et cadrer le fil rouge au début / limite du hors sujet aux débuts du projet (difficultés à prendre du recul).
- Une réunion avec Isabelle Illanes fin novembre nous a éclairés sur notre fil rouge : le voyage.
- Brainstorming réguliers et prises de décisions pour avancer : le choix a été de cadrer d’abord l’analyse de l’existant pour ensuite définir le dispositif et concrétiser les modules (partie plus créative).
- Les deux étapes se sont chevauchées : début du travail sur les modules (prototypes à proposer aux pairs par exemple) en même temps que la rédaction des analyses.
- Pendant les vacances : peu de réunions mais la discussion Whatsapp se poursuit, chacun avance sur différentes parties.
- Après chaque travail individuel réalisé : relecture par les pairs et échanges sur les modifications éventuelles à apporter.
- Les rôles attribués n’ont pas été vraiment appliqués (à l’exception du chef de projet qui a été porte-parole) sans que cela ne gêne la répartition du travail.
Les difficultés rencontrées
- Difficultés à faire des choix et à prendre du recul au démarrage du projet.
- Difficultés à se projeter dans l’espace et penser l’intégration du dispositif dans le(s) parcours de visite.
- Manque d’accès au contenu sur les œuvres (notamment sur leurs acquisitions).
- Manque de données pour l’analyse des publics, les retours du questionnaire public sont arrivés tard, nous avons difficilement pu les prendre en compte pour nos modules.
- Difficultés pour établir un devis précis étant donné l’aspect intrinsèquement évolutif et malléable de nos modules (pour l’instant).
Axes d’améliorations identifiés
- Il y a eu parfois des éparpillements lors des réunions (hors-sujets…). Pour répondre à ce problème qui parasitait l’efficacité de nos échanges et le processus décisionnel, nous avons établi des ordres du jour à chaque réunion, avec un secrétaire qui s’assure que les objectifs de réunion sont atteints en un temps donné.
- Dispersion sur le drive : beaucoup de documents, voire trop. Des rangements ont été faits progressivement.
- Il y a eu un tentative de mettre en place des outils de gestion de tâches (Exemple : Trello) mais il n’y a pas eu d’appropriation de l’outil car il s’agissait d’une découverte pour la majorité du groupe.
- Nous n’avons pas vraiment fonctionné avec un planning/rétro-planning cadré mais cela n’était pas gênant dans notre cas car chacun était assidu et nous nous fixions des réunions chaque semaine pour faire le point et attribuer les tâches. Cependant, cette pratique peut être fragile avec un groupe composé de davantage de membres et/ou moins assidu.
Bonnes pratiques à stabiliser
- Méthodes de travail : Réunions régulières (Discord) et discussions régulières (WhatsApp) avec une bonne réactivité des pairs, prise d’initiative (dans les tâches à réaliser, pour proposer des idées), démarche participative (relectures et avis réguliers des pairs), démarche réflexive, assiduité et autonomie de chacun dans les tâches attribuées.
- Mise en valeur des compétences et expertise de chacun : informatique, gestion de projet, expertise dans certains domaines comme anthropologie, maîtrise de certains outils comme Genial.ly. Chaque membre a su trouver sa place par son expérience personnelle et les échanges avec les autres.
- Valeurs : Bienveillance, créativité, agilité, motivation, entraide, esprit d’équipe, bonne entente et respect (aucun conflit entre pairs), motivation, écoute, échanges.
- Charte graphique du site internet définie assez rapidement.
Quel impact du projet sur le terrain ?
Avec le numérique, l’expérience muséale change. La numérisation des œuvres, par exemple, permet aux collections d’être sorties des dépôts où elles sont confinées la majeure partie de leur temps (on pense, dans le cas du Musée Georges-Labit, aux estampes par exemple). Mais une fois numérisées, il s’agit de réfléchir à la manière de les intégrer au musée. D’autres dispositifs numériques divers et variés cherchent souvent à attirer une nouvelle tranche de population qui ne serait pas sensible aux expositions traditionnelles, de rendre le public plus actif que passif lors de sa visite, ou encore de lui amener une expérience sensorielle nouvelle. Mais que souhaite-t-on réellement apporter au musée avec ces innovations ?
Les besoins exprimés dans la note de cadrage, couplés à nos réflexions et recherches, nous ont fait réfléchir à toutes ces questions et nous ont poussés à explorer les options réalisables pour cette proposition de dispositif numérique muséal. Puisque l’effort d’intégrer du numérique dans un musée peut se révéler superflu, nous y avons beaucoup réfléchi et maintes fois changé d’idée. Finalement, nous avons opté pour des dispositifs au service des œuvres et des visiteurs, interactifs et expérientiels, où tous les sens sont sollicités. Se basant sur nos différentes envies lorsque nous visitons un musée, nos dispositifs sont indépendants mais s’inscrivent dans un continuum lié au voyage, à la découverte.
Ces dispositifs et ce concept de voyage muséal, permettraient aux visit-acteurs de voyager à leur rythme et selon leurs intérêts au sein des collections et des univers, seuls ou en groupe. Les modules, présentés comme des escales lors du périple muséal, offriraient donc divers savoirs proposés sous diverses formes, à l’instar d’un voyage. Nous avons donc choisi d’intégrer le numérique à des fins expérientielles, interactives et ludiques, en essayant de définir et théoriser notre vision de la médiation et des usagers et ce que le numérique y apporte.
Le projet démultiplierait ainsi l’accès aux contenus dans une dynamique de contextualisation, de transmission des savoirs pour des usages variés de découverte et de connaissance des arts asiatiques, en apportant une réflexion et une vision nouvelle de la place des usagers dans l’expérience muséale.
Quels enseignements sont à tirer de cette expérience ?
Stratégie, expérimentation et évaluation. Voici au fond trois mots qui décrivent assez bien les réflexions et démarches menées au cours de ce projet. La démarche stratégique nous a permis de respecter les objectifs fixés par le musée et à cadrer leurs besoins dans notre réflexion. L’expérimentation nous aide à mettre en place les prototypes et le projet de manière plus générale. L’évaluation nous aide à agencer l’ensemble du projet pour le déployer concrètement et à plus grande ampleur.
Cette expérience, bien que chronophage, nous a en effet montré l’importance d’une réflexion approfondie de l’introduction du numérique dans les institutions muséales. Afin que les dispositifs numériques ne soient pas superficiels mais au service des visiteurs et des œuvres, il nous a fallu échanger, débattre, se (re)mettre en question et toujours tenter de se mettre à la place des différents acteurs du milieu (les conservateurs, les visiteurs, les œuvres)….
Cette expérience de gestion de projet nous a également beaucoup appris sur l’importance de l’équilibre coût – qualité – délai pour que le projet reste réalisable. Nous avons pensé à des dispositifs numériques de grande qualité mais qui étaient trop onéreux ou qui nécessitaient des ressources humaines qualifiées pour maîtriser ce type de dispositif, comme par exemple des expositions numériques immersives de projections d’images (comme peut le proposer par exemple l’Atelier des Lumières à Paris). Une de nos premières idées était de proposer des mises en situation en recréant des atmosphères visuelles et sonores mais cela ne nous a pas paru réalisable au vu des conditions : impossibilité de visiter le musée, scénographie en cours de changement et dispositifs technologiques très onéreux.
Plutôt que de proposer un dispositif difficilement réalisable et esquissé, nous avons fait le choix de proposer un dispositif plus abouti et adapté aux ressources financières, humaines et techniques/logistiques du musée (avec pour grande variable le contenu précis des modules que les équipes du musée doivent dans tous les cas définir dans une phase future de réalisation). Il a été pensé sur le long terme et peut évoluer en intégrant de nouvelles œuvres, se (re)centrer sur une seule zone géographique ou se décliner sur d’autres espaces/thèmes…